mardi 30 août 2011

Blaise Cendrars : Bourlinguer (les livres, l'absolu, les femmes...)

Blaise Cendrars "Bourlinguer"

Je déroge à mes habitudes, car je vous propose de nouveau des extraits du même livre de Blaise Cendrars « Bourlinguer ». Le choix de l’extrait précédent m’avait été inspiré par l’actualité (je m’en excuse). C’est l’émotion qui a commandé les choix de ceux-ci. Je les ai lus hier dans le dernier récit du livre « Paris, port de mer ». En partie grâce ces moments de lecture, cette journée a été particulière…
Ces extraits m’ont beaucoup touché. L’écrivain y parle de l’écriture et de la lecture, des hommes, et des femmes…

Chapitre 4, pages 364 et 365 "Il n’y a pas de fin à faire beaucoup de livres"

Souvent, le bistro du quai restait clos pour un jour ou deux et, en belle saison, pour une ou deux semaines quand il avait pris à Félicie la fantaisie d’aller faire un tour à bord d’une barcasse qui remontait par les canaux dans le Nord, car comme toutes les filles des Flandres la pétulante bistrote, qui scandalisait par son inconduite tout son voisinage de paisibles boutiquiers, quai des Grands Augustins, avait le mal du pays. Loin de me détourner d’elle, que je jugeais être une maitresse-femme, et de sa bande de rigolboches, mon amour des livres et de la lecture me faisait participer à la noce de ces insouciants avec frénésie, à croire que l’on m’a sevré en me mettant un livre à la main et que je suis resté sur mon appétit. Il est vrai que c’est maman qui m’a appris à lire et que pour cela elle me prenait sur ses genoux. C’est tout ce que j’ai eu d’elle. Son cœur était ailleurs. Et depuis…, comme la grosse Félicie, je veux vivre, et j’ai soif, j’ai toujours soit… L’encre d’imprimerie n’étanchera jamais cette soif. Il faut vivre d’abord. Si aujourd’hui je me dépêche d’écrire c’est que je veux le faire tant qu’il me reste du feu dans l’esprit, car l’âge vient et je veux me libérer des deux, trois gros bouquins que je porte en moi et que je nourris depuis toujours, comme Charles Baudelaire Mon cœur mis à nu, qu’il n’a jamais écrit, ce qui est à la base de tous ses malheurs. J’ai dit que je pensais en avoir pour dix ans. Durant ces dix ans, le monde aura fait peau neuve, j’en suis convaincu, et je veux encore en être. La souche est solide. Je pense à ma vieillesse et je serai un homme comblé si je puis aller mourir, le jour dit, au point choisi et disparaitre anonymement, sans aucun regret du monde, en pleine mer des Sargasses, là où pour la première fois la vie s’est manifestée et a jailli des profondeurs de l’océan et du soleil.

Si Deus quizer, amanha…, incrivaient dans leur livre de bord les découvreurs portuguais qui les premiers ont navigué dans ces parages peu fréquentés. Oui, si Deus quizer, demain… demain nous aborderons au nouveau monde ; déjà les flots ont changé de couleur, des oiseaux volent à notre rencontre et les courants qui viennent de l’ouest nous apportent les détritus d’une végétation inconnue, dont un vieux tronc rongé, peut-être par le feu du ciel, mais où certains veulent voir le travail de la main de l’homme, prétendant que c’est une pirogue. Nous avons vainement essayé de le repêcher. La nuit venait. Nous changeâmes d’amures pour la première fois depuis que nous étions établis dans l’alizé du sud-est. Nous en profitâmes pour louvoyer et tâcher de découvrir un cap de cette terre inconnue, encore invisible, chargée de lourds nuages et qui nous envoyait une brise chaude, fortement épicée. Etait-ce une île ou le continent de Cathay ? On en discuta longtemps ; certains affirmaient avoir vu des feux mouvants ; ce sont toujours les mêmes, et la question de cette pirogue reste obscure…
Des hommes.
Ils avaient la chance de découvrir des hommes nouveaux en partant à l’aventure et en naviguant droit devant soi.
Je ne compte pour rien. Mes livres non plus. Mais on ne dira jamais assez la part du féminin dans l’écriture. On croirait par moments que la psyché de Platon se reconstitue, et c’est cette rencontre inopinée de l’Hermaphrodite endormi ou Eros qui donne une sensation de plénitude au lecteur et qui fait le charme et la séduction de la lecture, ce qui expliquerait la terrible passion dont sont possédés les hommes pour le monde imaginaire. C’est de la magie. Que de livres, que de livres ! Il n’y a pas de fin à faire beaucoup de livres, dit l’Ecclésiaste (XII,14). Pas un livre qui n’émette un rayon de lumière. Même le plus mauvais. Une lumière sous le boisseau. Alors, c’est un cône d’ombre.



Chapitre 5 pages 376 et 377 "On ne vit pas dans l’absolu"
(Cet extrait fait suite à une savoureuse description du libraire Chadenat.)

Faisons la part des choses et tenons compte de l’entraînement auquel me voue mon comportement d’écrivain qui laisse courir les cinq doigts de sa main gauche sur le clavier de sa machine à écrire dans la solitude d’un meublé, loin de toute contingence, mais l’esprit extra-lucide, le portrait est synthétique, donc déformé. Mais je jure que je n’exagère pas, ou à peine… Cependant, comme j’en ai déjà noté quelques-uns au début du présent paragraphe en introduisant le personnage, je vais encore ajouter quelques traits familiers dans les deux, trois anecdotes qui vont suivre pour corriger ce que ce portrait a de trop abstrait. On ne vit pas dans l’absolu. Nul homme n’est coulé d’une seule pièce. Même un robot connaît la panne. Sans contradictions il n’y a pas de vie. Le cœur, le corps, l’âme, l’esprit, le souffle, tout peut être en contradiction dans le même individu et jusque dans son entêtement, l’intelligence est en contradiction avec la nature profonde de l’homme. La vie n’est pas logique, l’art du portrait, la perspective, la création de l’écrivain la ressemblance. Le monde est ma représentation et c’est pourquoi les journaux paraissent toutes les vingt-quatre heures, avec leurs fautes de français et leurs bourdes et leurs coquilles. Nous ne connaîtrons jamais d’autres traces de vie – vie de la planète, vie de l’individu – ce qui monte de la conscience sous traces d’écriture. Des pattes de mouche. Parlez-moi après de beau langage, de style et de grammaire. Et c’est pourquoi l’écriture n’est ni un songe ni un mensonge. De la poésie. Donc, création. Donc action. Et l’action seule libère. Sinon, il se forme un court-circuit, l’univers flambe et tout retombe dans la nuit de l’esprit.



Chapitre 8 pages 399, 400 et 401 « La femme est la base de la civilisation »


D’essence la civilisation est femme, elle reçoit plus qu’elle ne donne, elle absorbe, elle transmet, d’où sa lente, très lente évolution. C’est une valeur stable. Une constante et pas une spéculation. Ce qui m’a toujours frappé dans la conquête du Nouveau Monde c’est que les conquistadores ont été conquis par les femmes indigènes, Cortez par Marina, Marina qui a trahi les signes du zodiaque aztèque pour les saints de notre calendrier ; Pizarro et sa poignée de farouches aventuriers par les prêtresses des Incas ; les Espagnols égarés parmi les volcans de la Cordillère des Andes par les gardiennes des temples élevés au culte du Soleil sur les plus hauts sommets de Bolivie, comme vos fantassins portuguais (et souvent je les évoque, morion en tête, soufflant, suant sous la cuirasse ou le haubert, grimpant exténués le dur raidillon du Caminho de Mar, inextricablement embringués avec leur espingarde et peut-être une couleuvrine dans la brousse de la côte qui monte de Santos à Sao Paulo, où même nos 6-cylindres peinent !) par les filles peintes de vos Indiens d’Ipiranga ; à quoi j’ajouterai pour mémoire les servantes guaranis des missions du Paraguay, aujourd’hui encore célèbres pour leur beauté, mais pays qui n’est pas encore entré dans le circuit de la civilisation blanche sud-américaine, ainsi que le Mexique, le Pérou, la Bolivie, le Brésil, les quatre pays d’avenir et de vieille civilisation indianiste. Les Anglo-Saxons de l’Amérique du Nord n’ayant pas conquis mais exterminé les Indiens, la civilisation des Etats-Unis est factice et ne peut être que passagère et destructrice comme celle de Babylone qui était consommatrice et d’essence pédérastique, donc sans lendemain dans le temps malgré ses conquêtes dans l’espace.

- Et vous avez des Indiennes en France ? insinua doucement Paul.
- Mais, parfaitement, les femmes celtes, vous savez bien, ces druidesses mystiques qu’on représente une faucille d’or à la main et qui avaient des visions et prophétisaient dans la forêt de Brocéliande, dont ont tant abusé les romantiques influencés par les romans noirs d’Anne Radcliffe et de Walter Scott et les cours et les lectures publiques d’Edgar Quinet et d’Augustin Thierry. Comme Marina a trahi le Serpent à Plume pour son « Dieu blond », ainsi qu’elle appelait Cortez, elles ont trahi les Dieux de leur race pour assimiler les Dieux étrangers et conquérir leurs vainqueurs, comme plus tard, à l’époque des grandes invasions, les femmes françaises ont su civiliser les barbares de tout acabit, Teutons, Franks, Vikings, et leur apprendre le « doulx parler » de France qui coule comme un miel de leur bouche. La femme est la base de la civilisation. Son giron est un berceau. La Vierge Marie reçoit dans son tablier l’Enfant Jésus qui tombe du ciel. Ce n’est pas seulement un mythe et, sur un autre plan, presque exclusivement spirituel, le même rôle social était attribué par l’Antiquité aux pythies et aux sibylles, de Delphes et de Cumes, qui transmettaient la tradition humaine par l’initiation civilisatrice.
- Et que faites-vous des sorcières dont parle Shakespeare ? Je crois qu’elles étaient d’origine celte, comme vos Françaises, non ? me dit Paul.
- Demandez-le à votre ami Chadenat, il est inépuisable sur l’hystérie anglaise et leur histoire. Certes, les vierges de l’Isle-of-Man, le dernier sanctuaire des Celtes, étaient folles et sanguinaires, et comment ne pas croire à leur hystérie quand on songe à l’établissement, à la succession, au partage, à l’unification discutée de la couronne du Royaume-Uni entre les princes, les roitelets, les ducs, les chefs de clans montagnards, les descentes périodiques et les razzias politiques effectuées par les plus redoutables pirates de la mer, les Norges, les Danois qui bataillaient à mort autour d’une reine, et la possédaient tour à tour, et Shakespeare a raison de leur faire jouer les sorcières. Mais n’empêche que sans ce collège sacré des folles de l’Isle-of-Man, qui détenaient une tradition secrète, Colomban ne serait pas venu d’Irlande et d’au-delà avec ses moines savants, prêchant officiellement le christianisme et cachant Platon sous leur robe de bure, pacifiant, baptisant, initiant, pérégrinant sur le continent, et cette science venait d’où dans les îles de la mer d’Irlande – c’est une énigme, mais Platon connaissait l’Atlantide et les pirates scandinaves l’Amérique ! – sinon de ces femmes folles de religion qui se la transmettait oralement, de bouche à oreille, comme un grand secret venu de la mer – quand l’Atlantide était une Méditerranée - runes de la nuit des temps, la Poésie, le secret de l’Amour, de l’Amour divin, bien entendu. (Le secret de l’oreiller, c’est encore autre chose, j’ai assez bourlingué pour le savoir, et c’est inouï ce qu’une femme peut confier à un étranger de passage, je vous le garantis, Paul !) Sans toutes ces Vierges sages et sans toutes ces Vierges folles, ni l’Angleterre ni la France ne seraient ce qu’elles sont aujourd’hui, c’est-à-dire les deux seuls pays de l’honneur en Europe, d’où leur rivalité jalouse et leur lutte à mort, comme dirait Chadenat en vous administrant des preuves manifestes et multiples…


Conclusion :

Ce dernier dialogue est étonnant ne trouvez-vous pas ? Assurément les deux compères qui discutaient depuis leurs hamacs respectifs en cette heure accablante de la sieste, avaient lu des livres que nous ne lirons plus, de même ils avaient vécu des vies que nous ne vivrons plus, si si je vous l'assure, lisez le livre ! Jusqu'à certains de leurs mots qui ont disparu ou pris un autre sens, pas toujours le bon...
Cendrars a "bourlingué" dans tous les pays du monde de son époque, certains de ces pays n'existent plus. Il a rencontré tous les types d'hommes et de femmes, les meilleurs comme les pires.
Il a malgré tout su faire les bons choix, et parmi ceux-là, celui d'être un écrivain.

mercredi 17 août 2011

Paul B. Farrell : Taxez sur les super-riches ou les émeutes feront rage en 2012


Paul B. Farrell : Taxez sur les super-riches ou les émeutes feront rage en 2012

Une fois n’est pas coutume, voici une traduction, et qui plus est, la traduction de l’article d’un journaliste américain, publié dans la rubrique « MarketWatch » de l’édition numérique du Wall Street Journal le 16 aout 2011. Il ne s'agit donc pas de littérature !

J’ai été si étonné par la lecture de ce texte que l’envie m’est venue de le traduire pour le faire connaitre à mes concitoyens, (dans la mesure de mes modestes moyens bien sûr).
Tenus par moi à la machine à café de mon travail ou à la table familiale, les mêmes propos n’ont que peu d’influence sur la marche du monde, j’en suis bien conscient. Mais exprimés par un journaliste américain respecté et lus par une multitude de lecteurs avertis de par le monde, c’est autre chose, convenons-en.

Ce qu’il dit est complètement juste, et il me semble effectivement que nous glissions doucement vers une sorte de pire, si les inconscients qui mènent la barque du monde ne réagissent pas. Peut-être pas l’effondrement cataclysmique tel que celui décrit dans le nouveau film de la série « La planètes des singes » qui vient de sortir au cinéma, et que Paul B. Farrel cite en exemple. Mais il est vrai que l’absurdité et l’incroyable injustice de la crise économique qui se déroule devant nos yeux incrédules commencent à devenir insupportables à de plus en plus de gens. Sous l’effet de la colère qui monte, chacun réagit à sa façon, selon ses moyens ou sa situation.
La révolte peut s’exprimer aussi bien par l’écrit que par le feu.
Je vous recommande vivement la lecture de mon second Post Scriptum, en bas de page...

Voici donc ma traduction ainsi que le lien pour lire le texte original : http://www.marketwatch.com/story/tax-the-super-rich-or-revolution-will-rage-in-2012-2011-08-16?pagenumber=1

Taxez les super-riches ou les émeutes feront rage en 2012

En commentaire : Les 6 raisons pour lesquelles nous ne pouvons pas empêcher l'effondrement économique.

Quelle année ! Rage à Londres, en Egypte, à Athènes, à Damas. Tout est réel. Pas juste une métaphore du nouveau film "La Planète des Singes" ? Non, bien plus. Et  faites attention : encore plus de colère est à venir. De par notre planète une nouvelle génération est remplie de rage, cause du chômage élevé de l’inflation galopante, des rêves perdus, de l’espoir disparu. Alors que les super-riches, eux, s'enrichissent de plus en plus.
Écoutez ce sifflement : Celui du fusible en train de rapidement se consumer qui nous avertit. Réveillez-vous avant que cette rage ne vous explose au visage. Cette tempête va mettre en danger l'avenir de l'Amérique. Par des forces extérieures, certes. Mais beaucoup plus mortelles, issues du plus profond de notre psyché collective. Nous avons perdu nos repères moraux. Nous sommes en phase d'autodestruction.

Avertissement d’illuminé ? Non, cette alarme provient de l’élite du Fonds monétaire international. Un récent rapport du FMI a examiné les "causes des deux crises économiques majeures des Etats-Unis au cours des 100 dernières années, la Grande Dépression de 1929 et la grande récession de 2007", écrit Foroohar Rana, un chroniqueur économique à Time magazine. "Il y a deux similitudes remarquables dans les époques qui ont précédé ces crises. Les deux ont vu une forte augmentation de l'inégalité des revenus et de la dette des ménages par rapport à leur revenu. "Et dans chaque cas", du fait que les pauvres et les classes moyennes étaient sous pression, ils ont essayé de répondre par l'emprunt afin de maintenir leur niveau de vie."
Mais les riches "se sont enrichis, par les prêts, et cherchant plus d'endroits pour investir, ils ont fait monter les valeurs mobilières, ce qui au final a explosé à la face de tous. Dans les deux époques, la déréglementation financière et des politiques monétaires laxistes ont joué un rôle dans la création de la bulle. Mais l'inégalité elle-même - et la pression politique de ne rien changer, mais de la cacher - fut un facteur crucial dans l'effondrement. 
Les craintes d’un certain milieu ne sont pas un symptôme de la récession. Elles sont la source de celle-ci". Aujourd'hui, les conséquences de la crise nous hantent encore. Il y a cependant encore plus à venir.

La prochaine bulle,

Il y a une nouvelle bulle qui enfle. Personne ne peut l'arrêter ... elle va bientôt exploser.

Vous pigez ? Il y a d'énormes pressions politiques pour ne pas inverser l'inégalité jusque ce que celle-ci "nous explose à la face." Nous nions l'inégalité entre les riches et les autres 99%. Les riches sont accros à l’argent. Toujours plus n'est jamais assez pour eux. Ils prospèrent sur ​​la cupidité, aveugles aux besoins des autres. Pire, ils ne se sentent pas obligé envers l'Amérique comme une nation. Depuis les  milliardaires de Forbes, signataires de la promesse de dons intitulée «pas de nouvelles taxes », jusqu’à l’anti-américaine volonté de Mitch McConnell de saboter l'économie afin de tenir son engagement prioriataire de faire d'Obama le président d'un unique mandat.


Oui mes amis, le nouveau film « Début de la planète des singes » offre un puissant avertissement en parallèle des drapeaux rouges d’alerte du FMI. Écoutez le chroniqueur Zaki Hasan dans le HuffPost. Voici son scénario. Que va-t-il arriver pour l'Amérique si le fossé des inégalités s'agrandit, le marché de l'emploi stagne, la colère grandit ? Une double plongée dans la récession approche.
La prédiction d’Hasan va au-delà de la métaphore. Elle nous montre le profil psychologique d’une Amérique ressemblant à un toxicomane perdu dans sa dépendance. Et comme tous les toxicomanes, nous ne pouvons ni prendre conscience, ni arrêter, notre comportement autodestructeur :

La série de film des « Planètes des singes » a toujours tourné autour de l’idée de dommages que l’homme s’inflige à lui-même - l'idée que son orgueil insatiable le conduit inévitablement à des conséquences catastrophiques pour lui et ceux qui l’entourent, qu’il se manifeste par la cruauté envers les animaux ou la cruauté envers lui-même."
Dans le dernier film de cette série, notre monde est confronté à "la double menace" du génie génétique et d’un super virus. Mais le thème central demeure : "la chute de l'homme résulte de ses propres actions."
Ce film "La planète des singes" est allé plus loin, évoquant jusqu’à l'esprit fatalement défectueux de l'Amérique : "Méfiez-vous de la bête en l’Homme, car c’est la part du Diable " Dans cette scène du début du film, le docteur Cornélius, un orang-outan anthropologue, fait la lecture à haute voix d’antiques parchemins sacrés des singes : "Seul parmi les primates de Dieu, il tue pour le sport ou la convoitise ou la cupidité."
Voila qui nous fait penser à la guerre de Goldman pour dominer la grande jungle de Wall Street.
Et continuant de lire les manuscrits : "Oui, il va assassiner son frère afin de posséder les terres de son frère. Qu'il ne se reproduise pas en grand nombre, car il fera un désert de son domicile et du vôtre. Évitez-le ; repoussez-le dans sa tanière dans la jungle, car il est le messager de la mort."
Oui, l'évolution marche à reculons. Voici que la prophétie se réalise. Les singes savaient que nos cerveaux étaient ceux de saboteurs, détruisant notre juste place au sommet de la chaîne alimentaire de la jungle : "L'homme est une nuisance. Il dévore toutes ses ressources alimentaires dans la forêt, puis migre vers nos vertes cultures et les ravage. Plus rapidement il est exterminé, meilleur c’est."

Attention : La rage est en train de balayer Londres, Damas, Tripoli, le désert du Sahara se propage. 
Le tour de l'Amérique va-t-il venir ?

Imposons fiscalement les super-riches, ou la révolution se répandra prochainement sur l’Amérique.
Oui, faisons payer les super-riches. Taxons-les maintenant, avant que les autres 99% de la population ne se lèvent, et déclenchent une nouvelle révolution américaine, une autre crise, une nouvelle Grande Dépression. 
Historiquement, les révolutions se construisent sur de longues périodes, nourries progressivement par de plus en plus de pression jusqu’à atteindre la masse critique. Puis, "quelque chose se passe." Soudain. Imprévisible. Une étincelle déclenche l'embrasement. 

Personne ne l'a vue venir en Egypte. La simple mention sur la page facebook d'un jeune cadre de Google d’un suicide dans un village reculé, est devenue une source virale, qui a provoqué une colère incontrôlable qui ne put être arrêtée.

Alors, réfléchissez sérieusement aux six avertissements suivants à propos de la nouvelle méga-bulle qui va bientôt nous exploser collectivement à la face :

1. Attention : Le chômage élevé est à court terme une véritable bombe à retardement.

Un rapport spécial publié dans le Time, «Pauvre vs Riche : un nouveau conflit mondial », nous avertissait qu'un «conflit entre deux mondes – l’un riche, l’autre pauvre - était en développement, et que le champ de bataille était la planète elle-même. »
Seulement 25 nations développées de 750 millions de citoyens « consomment la plupart des ressources de la planète ... profitent des plus hauts niveaux de vie de l’histoire. » Mais maintenant, ils sont face à 100 pays pauvres peuplés de 2 milliards de personnes, la plupart vivant dans la pauvreté, tous exigeant « une part toujours plus grande de cette richesse. » Un leader britannique appelle cela une « bombe à retardement pour l’espèce humaine. »

2. Attention : Les réductions d'impôts pour les riches augmentent le chômage des jeunes.

Dans une colonne du New York Times, Matthew Klein, un Conseiller de 24 ans, chercheur en relations internationales, a fait le parallèle entre le taux de chômage de 25% chez les jeunes Egyptiens et celui de 21% pour les jeunes Américains : «Les jeunes portent tout le poids de la charge» qui résulte des efforts des gouvernements pour rééquilibrer les budgets. «Les impôts sur les travailleurs sont augmentés, les dépenses sur l'éducation sont coupées tandis que les subventions et les droits d'hypothèque pour les personnes âgées sont intouchables. » Et qu’il y a encore plus de réductions d'impôt pour les riches.

3. Attention : Les riches s'enrichissent sur l'inflation des matières premières, les pauvres se mettent en colère.

John Waggoner de USAToday a averti dans un article : « une flambée des prix alimentaires jettera des millions de personnes dans la pauvreté et la faim. » La « hausse des prix alimentaires signifie une descente dans l'extrême pauvreté et la faim, avertit la Banque mondiale. » Le conseiller financier PIMCO avertit que l'inflation des matières premières expose «aux inégalités sous-jacentes et aux brûlantes questions liées à la qualité de la vie qui couvent sous la surface. »

4. Attention : Les super-riches sont aveuglés par leur dépendance à l'argent.

Dans "Free Lunch : Comment les plus riches américains s’enrichissent aux frais du gouvernement (En s’en tenant à la loi)," David Cay Johnston explique que les riches sont comme des toxicomanes, et que leur addiction à l'argent est comme la dépendance à la cocaïne, trop n'est jamais assez. Selon des données récentes : "300.000 Américains", soit le top ten de 1% des revenus "ont un revenu presque équivalent à celui des 150 million d’Américains qui composent la moitié économique la plus faible de notre population".

5. Attention : Les politiciens sont corrompus par cette dépendance à la cupidité des super-riches.

Dans "Le pacte suicide de Washington" Ezra Klein de  Newsweek met en garde : "Le congrès nous fait prendre le cap vers le pire de tous les mondes : des pertes d'emplois massives et une explosion du déficit." Et le drame du plafond de la dette ne fait juste que rendre les choses beaucoup plus graves. Des millions d'emplois ont été perdus durant les années Bush, en plus de ses guerres, et de ses réductions d'impôts pour les riches. Pourtant, aujourd'hui, le GOP (La majorité républicaine au congrès) est dans le déni total de ce legs, aveuglé par son obsession de détruire la présidence Obama, quelqu’en soient les conséquences.

               
6. Attention : Bientôt la colère emportera les révolutionnaires, puis dominera l’Amérique du "Tiers Monde".

Oui, nous sommes mûrs pour une révolution surprise. Dans "Amérique du Tiers Monde" Arianna Huffington avertit: "Washington s'est précipité au secours de Wall Street, mais a oublié Main Street" (NDT : les gens de la rue). A présent, la promesse de Bernanke d'un argent bon marché jusqu'en 2013 n'est qu'un "repas gratuit" pour les 1% les plus riches. En attendant, "un Américain sur cinq est au chômage ou sous-employé. Une famille sur neuf incapable de régler le paiement minimum de ses cartes de crédit. Une personne sur huit est hypothéquée en défaut de paiement ou sous saisie. Un Américain sur huit dépend de coupons alimentaires. L’ascension sociale a toujours été au cœur de l'American Dream ... cette promesse a été brisée ... Le rêve américain devient un cauchemar. »

Réveillez-vous les gars. Les toxicos super-riches détruisent le rêve américain de tous. Ils détruisent l'économie américaine. Ils ne se soucient pas de vous. Oui, ils entendent la bombe à retardement. Et ils stockent l'argent.

Ne dites pas que vous n'avez pas été avertis. Le FMI voit ce nouvel effondrement se propager rapidement à travers la planète. Ouvrez vos yeux. Vous n'êtes pas en train de regarder un film.
Il ne s’agit pas d’une métaphore. Préparez-vous dès maintenant pour la révolution, la lutte des classes, le krach boursier, l'effondrement économique, un plan pour une autre dépression.

Post Scriptum : Cet avertissement vaut bien sûr pour nos "élites" françaises, vous vous en doutez, et pour  notre anachronique président qui a donné le signal de leur festin le soir de son élection au Fouquet's...


2ème Post Scriptum, au 21/08/2011 : Il ne fallait pas s'inquiéter outre-mesure d'une éventuelle révolution américaine M. Farrel ! L'armée américaine est là qui veille !
Lisez plutôt ces 3 articles étonnants :




mercredi 10 août 2011

Blaise Cendrars : Bourlinguer (à propos des émeutes d'autrefois)


J’ai découvert ce livre en me promenant chez les bouquinistes. Le livre était très beau, une édition pour collectionneurs publiée en 1957, et puis j’avais depuis longtemps dans l’idée de lire quelque chose de cet auteur, à force d’en avoir entendu dire du bien.

Bourlinguer est un recueil de récits autobiographiques, publié en 1948. Je confirme, c’est très bien. C’est de la littérature, forte, épicée, comment dire ? Ça sent le vécu. Il ne s’agit pas d’un roman à l’eau tiède comme il y en a de nos jours à foison. Ce gars était un aventurier, un marin, un érudit, un combattant. Bien que de nationalité suisse (né en 1887), il s’est engagé en 1914 dans la légion étrangère et a perdu le bras droit en 1915. Un Français comme je les aime, un étranger qui aimait l’idée de la France.

Il y a nombre de passages étonnants dans ce livre et j’étais bien embarrassé pour choisir un extrait, aussi me suis-je laissé inspirer par l’actualité du jour, à savoir les émeutes en Angleterre. J’ai lu tant d’âneries à ce sujet sur Internet que je me suis souvenu de l’un des récits du livre « Rotterdam », qui décrit une rixe géante, un soir de Noël. Cendrars décrit les faits qui sont d’une violence inouïe et parait-il coutumière à l’époque, comme il l’explique au début du récit. Mais ce qui m’a le plus marqué, c’est l’explication qu’il en donne : « On n’y peut rien. C’est la misère des hommes qui veut ça et qui les pousse avec mégalomanie. C’est irrésistible et irréfrénable. Les individus n’y sont pour rien. C’est tout ce que l’on peut en dire. »

Je comprends et partage ce qu’il veut dire. La misère pousse au désespoir, au nihilisme. Plutôt que de se retourner contre les responsables, puissants et hors d’atteinte, le peuple désespéré se retourne contre lui-même, peut-être par honte que sais-je, comme pour se punir de sa passivité ou de son impuissance ?

Ne vous y trompez pas cependant, le livre ne parle pas que de violence. La plupart des récits sont emprunts de sensibilité et d’humanisme, pas un humanisme à la Plutarque, mais une bienveillante lucidité et une acceptation de tous les hommes, tels qu’ils sont vraiment.

Alors lisez ci-dessous la description d’une formidable émeute provoquée par la misère, et si vous vous demandez ce qui se passe en Angleterre cet été, regardez à la fin du texte cette reproduction d’une image publiée en octobre 2010 dans le journal The Guardian. Elle parle d’elle-même, comme on dit…

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Une semblable bagarre ne se raconte pas, de même qu’on ne peut rien dire de l’origine d’une rixe. Cette nuit de Noël il y avait eu de l’orage dans l’air et durant toute la soirée le Jordan avait été secoué par les rafales du suroit. Même dans les solitudes du Farwest les cow-boys savent que les nuits où il ya de l’orage dans l’air et que souffle le vent du Sud qui vous met les nerfs en pelote et vous trousse à rebrousse-poil, les bêtes sont inquiètes, et les bergers montent à cheval et tournent toute la nuit autour de leurs immenses troupeaux en chantant pour éviter la panique, car même les bœufs sont sensibles. Tout marin qui a un tant soit peu bourlingué sait combien les quartiers bas des ports sont inflammables et combien facilement les ruelles chaudes prennent feu sans qu’on ne sache jamais comment ni pourquoi. Il y a des nuits fatidiques. Ce ne sont pas toujours les mauvais garçons qui ont, certes, la lame facile, qui en sont cause, ni la soulographie des marins qui est inhumaine, monstrueuse, histrionne, spectaculaire et pousse au néronisme. Si cela éclate avec la soudaineté et la violence d’un typhon dévastateur, c’est qu’il y a trop de misère, donc trop d’électricité dans les quartiers vieux où les baraquements tout neufs qui circonvoisinent les ports sous toutes les latitudes, et maints et maints navigateurs y ont laissé leur peau, poignardés au coin des ruelles fameuses ou étranglés dans les barbelés anonymes d’un settlement. La police le sait bien dont les enquêtes n’aboutissent pas après coup ; il ne s’agit qu’exceptionnellement d’histoires de femmes, ou de règlements de comptes, ou de crimes crapuleux, car la vie des uns et des autres est bien assez dure comme ça et cela n’en vaut réellement pas la peine, quoi que les journaux puissent raconter, mais neuf fois sur dix, de folie collective, de panique, de tristesse, de cafard, de coup de bambou qui dégénère en émeute, voire en révolte gratuite. On n’y peut rien. C’est la misère des hommes qui veut ça et qui les pousse avec mégalomanie. C’est irrésistible et irréfreinable. Les individus n’y sont pour rien. C’est tout ce que l’on peut en dire.
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Alors retentit un rugissement énorme et la bagarre générale de se déclencher. Les tables s’effondraient dans un grand bruit de vaisselle, les chaises volaient, un lustre s’abattit sur la tête des gens, les glaces, les miroirs éclataient d’un rire hystérique, fracassés par les pots de fleurs qui tapaient dedans, lancés comme par des catapultes. Les femmes piétinées hurlaient de terreur. Les dressoirs, les dessertes cascadaient et je ne sais comment je me trouvai tout à coup porté dans la rue, déjà en pleine révolution, les lampadaires démolis, les becs de gaz renversés, les vitrines défoncées, les devantures pillées par toute une vermine de gosses qui arrivaient à fond de train par toutes les ruelles, et nous fûmes happés, PeterJordaan. Donc la rixe qui n’était pas née de l’incident du restaurant, tout le quartier du port était en effervescence et mis à sac. On marchait sur du verre pilé. IL n’y avait plus de vitres aux fenêtres. Les portes étaient défoncées. On se servait de leurs montants comme de battoir ou de massue. On s’assommait. Tout le long de la colonne qui progressait sous la huée des putains qui nous bombardaient des étages avec tout ce qui leur tombait sous la main dans les chambres, pots à eau, poubelles, fers à friser, flacons de parfum, fers à repasser, pots de chambre, nécessaires de toilettes, seaux à charbon, disques de gramophones, bouteilles de mousseux, ce n’était que distribution et échange de coups. En tête et en queue de colonne les mecs du Jordaan nous barraient la rue et les mecs étaient durs. On avançait pas à pas. Il y eut des reflux et plusieurs fois nous fumes refoulés dans les ruelles latérales, cependant que le populo s’ameutait et que loin de se fondre le nombre des bagarreurs grossissait à vue d’œil dans les deux camps. A un moment donné je me trouvais en pointe devant un mur de poitrines qui barraient la rue et je fonçais avec méthode la tête en avant dans le ventre de nos adversaires, forant mon trou, cependant qu’à ma droite, Peter cognait dur des deux poings, visant consciencieusement les mentons, et, qu’à ma gauche, un inconnu, un grand matelot américain, armé de deux fragments de disques ramassés sur le pavé et tranchants comme des rasoirs, faisaient des moulinets avec ses longs bras, tailladait des visages, fendait des nez, entamait des joues, coupait des oreilles. Le sang pissait de ces vilaines balafres. On reculait devant l’escogriffe. Et c’est alors seulement que les couteaux furent dégainés, que les revolvers se mirent à claquer et qu’il y eut un semblant de débandade.

Le plus dur fut de conquérir le passage d’une passerelle, donnant sur une des grilles du port, de l’autre côté d’un canal, et où la bataille fut particulièrement sanglante et que nous n’aurions, je crains, jamais réussi à gagner tellement la mêlée étaient inextricable à cet endroit et dégénérait en tuerie, si, tout à coup, un piano n’était venu tomber au milieu de nous, venant d’un troisième étage et creusant un vide dont nous sûmes profiter, Peter et moi, pour franchir cette maudite passerelle jetée sur le canal et escalader les grilles du port qui étaient fermées comme de bien entendu, suivis d’une bande de lascars qui couraient avec nous et qui n’appartenaient pas à notre bord. Le bateau était sur le point d’appareiller, nous nous étions battus plus de trois heures. Comme toujours police et gabelous s’étaient terrés.

J’ai déjà dit que Peter fut évacué sur l’hôpital, avec d’autres types plus ou moins grièvement touchés. Je n’ai donc jamais revu Peter Van der Keer. Je ne puis donc dire comment cette affaire tourna pour mon copain ni comment elle se termina pour les autres et quel en fut le bilan définitif, stupide et inutile. C’est la rixe la plus chaude à laquelle j’ai jamais pris part. A windy corner. On oublie tout. Mais je ne pourrai jamais oublier ce que c’est qu’un piano venant se fracasser au sol, tombant d’un troisième étage. Mille chats qui miaulent dans la nuit faisant l’amour sur le rebord d’u toit ou mille chattes en chaleur menant leur sarabande parme les gargouilles sur la façade d’une cathédrale n’existent pas et ne comptent pas par rapport à un piano dont toutes les cordes se rompent d’un coup en faisant éclater le ventre de la caisse de résonance et miaulent en arpège toutes les notes, du grave à l’aigu et de l’aigu au grave. C’est aussi assourdissant mais exactement le contraire que le boum ! d’un coup de canon parce que l’explosion d’un piano reste malgré tout inscrite dans une échelle harmonique.

J’ai parlé d’une fête. C’en était une. J’ai souvent la nostalgie de réentendre ce piano providentiel. Mais qui inviter parmi les plus fameux virtuoses pour faire sonner et resonner ce foutu piano-forte ? Je ne vois que Rubinstein capable d’improviser sur cet instrument tombé du ciel, Arthur Rubinstein, l’infatigable globe-trotter qui a fait plusieurs fois le tour du monde avec son piano comme le Voyageur et son Ombre et qui répand de la joie Nietzschéenne partout, dans les salons, chez les banquiers, à la cour d’Espagne, au Vatican, en avion, à bord des cinglants paquebots, dans les glaciales de concert où il déchaine l’enthousiasme ou le délire dionysiaque, mon bon ami Rubinstein, Arthur le bon vivant, ou encore Oscar, l’homme canon de Luna-Park, s’il est pianiste, cet athlète qui tombe également du ciel et qui est entrainé, ou Savinio, le charlatan.



Voici comment Le journal Anglais illustrait en octobre 2010 les mesures prises par le gouvernement :


Post Scriptum :
Je ne tente pas de faire avec cet article un raccourci "hâtif". Je suis conscient des différences d'époque, de lieu, de contexte, etc. Mais y a-t-il autant de différences que cela ? Que peut-il arriver d'autre lorsque l'on pousse les gens au désespoir ? Les abrutir par la télé ne suffit pas, ne suffit plus.
Vous pouvez également lire cet article intéressant sur le site du Guardian : "You won't prevent future riots by disregarding the psychology of crowds"